Ceux que l’on a aimé appeler affectueusement « Chibanis » (en arabe dialectal « les vieux aux cheveux blancs ») sont ces hommes retraités du bâtiment et de l’industrie, originaires du Maghreb ou d’Afrique sub-saharienne et vivant seuls ici en France. Leurs préoccupations premières étaient d’envoyer de l’argent à leur famille restée au pays pour subvenir à leurs besoins. Ils exerçaient des métiers manuels pénibles physiquement. Ils font partie des invisibles de nos sociétés, sans que personne ne connaisse véritablement leur histoire.
Dans les années 1960, la France a fait venir des travailleurs immigrés, essentiellement maghrébins. Pensant que cette migration ne serait que temporaire, ils n’ont pas opté pour le regroupement familial et ont vu leur situation s’éterniser.
Aujourd’hui, on constate que ces travailleurs immigrés restent en France au-delà de l’âge de la retraite. Les causes de ce non-retour sont multiples :
- La détérioration des liens familiaux après de longues années d’absence
- La crainte du retour dans un pays ou ils se sentent parfois étrangers
- Le désir de pouvoir bénéficier de soins médicaux
Aussi , les allers-retours réguliers entre le pays d’origine et le pays d’accueil causent des problèmes d’ordre administratif, de versement de prestation et empêchent un accompagnement social régulier.
De plus, l’exclusion et l’isolement sont des problématiques auxquelles les Chibanis sont confrontés. En effet, ils sont favorisés par :
- le manque de lieux de vie et d'écoute.
- le manque de connaissance de leurs droits (sociaux, santé, logement, etc.).
- une mauvaise appréhension des institutions.
- des difficultés linguistiques.
- une quasi-absence de loisirs.
Les raisons de cet isolement sont liées à une double perte : la perte de leur statut de travailleur et la perte des liens affectifs avec leurs familles et leur milieu d'origine.
Etant donné que leur socialisation et leur intégration se faisaient par le travail, à l’âge de la retraite, ces travailleurs se retrouvent en situation d’isolement. Leurs liens familiaux se résument souvent à l’envoi d’une partie de leur petite retraite à leurs familles. La solitude, l’isolement, l’ennui, l’indifférence des autres et le poids de leur vieillissement les plongent dans un état de dépression et favorise leur exclusion de la société.